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Il était une fois… la marbrite Fauquez : les sous-produits (2e partie)

Actualités du CAD

Nous l’avons mentionné dans la première partie, le volume des déchets de production de la marbrite avoisinait les 30 %. Ce défaut majeur fut une incitation à leur valorisation par une mise en œuvre dans des revêtements de sols ou des matériaux de parement : granito, marbrito, cimorné et mosaïverre.

Le granito et le marbrito sont des dallages en béton comprimé auquel ont été mélangés des fragments de pierre naturelle, de marbre coloré ou de marbrite. Leur teinte peut être assortie à celle des lambris.

Le cimorné est, comme son nom le suggère, un ciment orné d’éclats de marbrite ou de marmorite. Les trois couches de ciment et l’incrustation de verre concassé renforcent l’étanchéité et confèrent une uniformité à la maçonnerie. En outre, cette technique dispense du chaulage régulier des briques. Le cimorné est dès lors une solution pratique, résistante et à la portée de toutes les bourses pour la réfection des façades. Produit breveté, il connaît la consécration à l’Exposition internationale de Liège en 1930.

Le mosaïverre est l’assemblage de morceaux irréguliers de marbrite scellés dans du ciment. Il est principalement utilisé dans les soubassements des façades, pour la réalisation de mobilier et d’ornements de jardin ou encore en revêtement de sol. Ce fut notamment le cas dans le hall central du pavillon d’honneur du Commissariat général de l’Exposition universelle et internationale de Bruxelles en 1935 ; l’architecte Henri Lacoste (1885-1968) y fit rivaliser la marbrite avec le marbre rouge de Merbes-Sprimont.

La Deuxième Guerre mondiale marque l’arrêt de la production de marbrite ; elle reprend en 1949, sans jamais égaler le rythme des décennies précédentes. Le département cesse son activité en 1964.

Les stocks importants de déchets, les différents rachats à des concessionnaires belges et étrangers, l’utilisation de déchets de marmorite permettent à Pierre Petroons (1897-1969) –plafonneur à Braine-l’Alleud, inventeur du cimorné et du mosaïverre –, puis à son successeur Laurent Pays (1932-2017), de poursuivre l’activité de pose de cimorné jusqu’en 1990. De nombreuses maisons crépies de cette matière colorée et brillante, disséminées sur l’ensemble de notre territoire, du Hainaut occidental au fin fond de la Gaume, témoignent encore de l’engouement pour les différentes applications de la marbrite.

Le produit, réputé meilleur que le marbre, plus beau que la faïence, ne se fabrique plus et les artisans qui en connaissaient les techniques de pose ont disparu. D’un site industriel jadis florissant, il ne subsiste aujourd’hui que quelques maisons ouvrières (1), deux demeures directoriales (2), une salle des fêtes (3-4) et une chapelle désacralisée, transformée partiellement en habitation et en crêperie mais aussi, occasionnellement, en salle de réception ou de concert. Deux tentatives pour sauver la chapelle Sainte-Lutgarde ont échoué en 1978 et en 1986. L’avis favorable rendu par la CRMS en 1986 dans la perspective d’un classement de la salle des fêtes n’a pas été suivi d’effet. Les projets touristiques ont fait long feu. Le passé glorieux de ce hameau est peu à peu tombé dans l’oubli…

Monique Merland
Documentaliste
 

1. Fauquez, rue Saint-Michel, cité ouvrière.

2. Fauquez, maison du directeur des verreries.

3. Fauquez, salle des fêtes.

4. Fauquez, cinéma.

 

Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter :

Alain Forti et Jacqueline Miller, Ittre, Virginal-Samme, La S.A. des Verreries de Fauquez, dans Pierre Paquet, Anne-Françoise Cannella et Gaëtane Warzée (dir.), Le Patrimoine industriel de Wallonie, Liège, 1994, p. 435-440.

Lucia Gaiardo et Claire Billen, Les maisons en marbrite et cimorné en Wallonie, Namur, MRW, DGATLP, 1999, (Carnets du Patrimoine, 27).

Isabelle Istasse, L’Espace Caviar et la Chapelle de verre rappellent le passé des verreries de Fauquez, Marcinelle, Patrimoine industriel Wallonie-Bruxelles, [2010]. 

Freddy Joris, Projets et expériences de réaffectation du patrimoine religieux, dans Les Cahiers de l’Urbanisme, n° 35-36, 2001, p. 48-59.

Isabelle Lecocq, Le verre architectural (1925-1937), dans Le verre Art déco et moderniste de Charles Catteau au Val Saint-Lambert, catalogue d’exposition, Musée royal de Mariemont, 2011, p. 78-101.

Olivier Lemesre, La chapelle Sainte-Lutgarde de Fauquez, dans Maisons d’hier et d’aujourd’hui, n° 67, 1985, p. 32-49.

http://balat.kikirpa.be/results.php?linkthrough=BA&linkval=Chapelle+de+Verre%5BVirginal-Samme%5D.